Philippe dans la roseraie

Philippe voulait marcher un peu dans son lieu préféré du château: la roseraie. Il marchait clandiquant sur sa canne. S'arrêtait de temps à autre pour regarder les fleurs. Comme elles étaient charmantes. Malgré toute cette beauté, Philippe était seul et avait l'air pensif. Son coeur balançait. La perte de Carmen était très douloureux mais il devait aller de l'avant. Il devait s'occuper de sa santé et renprendre du poils de la bête. La belle cyrielle lui avait fait oublier pendant quelques instants Carmen. Elle serait de bonne compagnie. Philippe avait déjà dans la tête des idées de bal. Il leva les yeux vers l'horizon et vit le soleil se couché. Il resta un instant là appuyer sur sa canne le regard dans le ciel orangé. Qu'est-ce qui pourrait interrompre un tel tableau?

La question à se poser, ce serait plutôt "qui".
Pour une fois qu'Isabelle ne venait pas ici volontairement... Non, en réalité, pour une fois, elle n'était venue ici que par coïncidence. Comme elle ne voyait pas tout le temps Marie, qu'elle n'avait plus à s'occuper dans les cuisines, et que Chouchou lui manquait aaaaaaaaaffreusement, cela commençait à bien faire, et quand on est Isabelle, parisienne sauvage de souche, on peut s'ennuyer très vite.
Donc, petite balade s'imposait. La décision de l'intinéraire fut vite prise : autant marcher au hasard, sans regarder devant soi. Et, ô joie, ses pas l'avaient guidé vers ces lieux de la Roseraie.
Et ces lieux commençaient à être un peu trop fréquentés à son goût.
Magnifique coucher de Soleil à l'horizon, il fallait bien dans le tableau quelqu'un d'autre qui l'observe pour compléter le tout.
Ce quelqu'un, bien qu'incertaine au début, elle crut reconnaître en lui son cher ami Philippe.

"Philippe ?" appela-t-elle, doucement, pour s'en assurer.

Pas de doute, en fait... c'était bien lui.
Étant donné que c'était bien lui, elle n'eut pas de scrupule à lui faire un maaaagnifique sourire et à s'approcher de la silhouette.
Eh, eh. Quelque chose n'allait pas. Elle put apercevoir une canne en bois sculpté. Inquète, il fallut bien qu'elle questionne :

"Mon Dieu ! Que s'est-il passé ? Pourquoi cette canne ? Seriez-vous blessé ?"

Évidemment, comme vous le savez, Isabelle ignorait tout du fait que Monsieur, le frère du Roi = Philippe, son bon ami. Après tout, pourquoi est-ce que le frère du Roi se serait intéressé à sa petite personne ?

Philippe se retourna en entendant son nom. Il vit la belle Isabelle venir vers lui avec un sourire qui se brisa lorsqu'elle vit la canne du boiteux. Philippe en fut attristé. Cette canne n'était qu'un détail, certes blessant mais bon."Isabelle, c'est un plaisir de te voir ! Comment vas tu?"Philippe alla avec la belle jusqu'à un banc ou il s'assit avec difficultés et posa la canne prêt de lui. Isabelle posa sa question. Il baissa le regard."Tu n'es donc pas au courant? Pourtant cela à fait un grand brouhaha à la cour. C'est depuis le bal où Marie et moi t'avons fait entrée à la Cour!"

Comment allait Isabelle ? La question était bien posée à vrai dire. C'en était presque une question piège. Il y avait longtemps qu'Isabelle trouvait du mal à y répondre.
Que dire ? Qu'elle souffrait horriblement ? Qu'elle jubilait et sautillait tout au long de la journée ? Ni l'une ni l'autre de ces deux alternatives n'était juste. Elle souffrait, certes, d'être séparée de François, et les rumeurs qui circulaient ne l'aidaient pas. D'un autre côté, être femme de chambre de Marie la comblait d'aise, et jamais elle ne saurait en remercier assez Philippe. Mais en tout et pour le tout... la situation lui convenait-elle vraiment ? Ne rêvait-elle pas parfois de tout lâcher et de s'en revenir pour Paris, vivre avec sa soeur ? Ou qui sait, de partir à l'aventure, de voyager sans but précis, sans un sou, laissant sa vie passée derrière elle ?
Ah, oui, de bien beaux rêves. Mais ils restaient des rêves, justement. Le courage lui manquait pour blesser ceux qui comptaient à ses yeux. De plus, elle n'était pas certaine de réussir dans pareille entreprise.
Elle rêvait d'une vie plus libre, c'est tout. Ça faisait sourire dans les heures vagues, pleurer dans les heures tristes, rêver dans les heures sombres. Jamais plus ni moins.

"Oh, je me suis déjà mieux portée. Mais j'ai la présence de Marie qui m'allège quelque peu, et cela, c'est à vous que je le dois."

Ce fut sa réponse, agrémentée d'un léger sourire, et d'un remerciement.
Après quoi, Philippe la fit s'asseoir sur un banc à proximité. Elle observa avec quelque inquiétude le jeune homme se poser difficilement à ses côtés. Ne voudrait-ce pas dire qu'il était gravement blessé ?
Comme il parlait du bal, les yeux d'Isabelle furent dans le bal quelques secondes. Le bal... toujours frais dans sa mémoire. Y penser la rendait mélancolique, allez savoir pourquoi. Ce qui l'avait bien entendu marquée, c'était la danse, les masques, son prince et... et cette rumeur, cet évènement qui avait tout brisé. Monsieur se meurt, disaient-ils... Monsieur a été poignardé.
Alors, le charme s'était rompu et, malgré tout, elle s'était sentie un peu seule. Même si...
Mais rien ne lui était parvenu sur Philippe, depuis. Elle se souvenait juste de ne l'avoir plus vu après que la rumeur se soit répandue.

"Je ne sais pas... Que je sache, Monsieur, le frère du Roi, occupait toutes les conversations. On dit qu'il a été poignardé. Mais vous le savez certainement, puisque vous êtes son cousin. En tous les cas... je n'ai point entendu parler de vous. Ou alors, je n'ai pas su vous reconnaître ; vous ne m'avez jamais dit votre nom," ajouta-t-elle, intriguée.

Lente à la compréhension ? Non. Distraite. Elle pensait à plusieurs choses en même temps. Il ne lui restait guère assez d'esprit pour relier Monsieur et Philippe.
Mais, évidemment, sa méfiance naturelle et son intuition reprirent enfin le dessus. Elle ouvrit tout d'un coup grand les yeux, comme si une lumière venait de s'allumer dans sa tête. Ses joues pâlirent considérablement, et elle se tourna vivement vers Philippe. Alors, elle parcourut des yeux les (trop) riches vêtements du jeune homme, de la mémoire ses (trop) riches appartements et la (trop) riche robe qu'il lui avait fait faire.
Bon. Réflechissons. Il avait les moyens comme Monsieur, il était blessé comme Monsieur, et vraisemblablement faisait partie de l'entourage du Roi et de la famille de François, COMME Monsieur.
Se pourrait-il que... ?

"Oh, ne me dites pas que ce nom serait 'd'Orléans'," gémit-elle, tout d'un coup déconfite.

C'était à devenir fou. Soudainement, elle se sentit extrêeeeeemement fatiguée. Si Philippe d'Orléans l'avait prise d'amitié, où allait le monde ? Ne suffisait-il pas déjà d'être amante du cousin et amie de l'amante du Roi ?
Elle s'affala sur le banc, pour se redresser aussitôt, se disant qu'elle n'avait pas intérêt à faire n'importe quoi devant un personnage si important. Et maintenant, comment se comporter face à lui si elle l'avait, jusqu'à présent, traité en simple ami ? Hum ? Que fait-on dans ces situations ? Parce qu'elle en avait assez d'être confrontée aux grands sans savoir qu'ils sont grands, pour ensuite s'en rendre compte et perdre totalement la face. C'était de trop déroutant, et on ne l'y avait tout de même pas habituée ! Ah, c'était tout elle, ça ! Il ne manquait plus qu'elle tombe sur le Pape, demain matin...

Philippe regarda la Belle Isabelle. Il l'écouta attentivement lorsqu'elle lui parla des rumeurs de la soirée. Philippe esquisa un sourire en plongeant dans le regard de la jeune fille. Le cerveau d'Isabelle semblait fumer de réflexion et son coeur battait de peur de comrpéhension. Philippe pensait qu'elle avait tout compris depuis longtemps. MAis après tout, elle agissait toujours avec lui de la même façon. Elle ne se doutait de rien.

"Alors ma chère Isabelle, je suis donc mon propre cousin."

Philippe baissa la tête avec un sourire faux. IL avait peur de la réaction de la belle. Lorsqu'elle s'affola et demanda à Philippe si son nom était d'Orléans. Il se leva avec difficultés et se mit devant Isabelle.

"Ne me regardez pas autrement j'en serais blessé!"
Philippe soupira et prit un long moment pour rassembler son énergie.

" Oui je suis bien Philippe d'Orléans, Monsieur le frère du Roi. J'appréciais votre compagnie dans le sens où vous me voyez comme Philippe et non comme Monsieur. Ne changez point!"

Philippe s'agenouilla devant Isabelle et la regarda d'un air triste. La jeune femme était toujours aussi affolée. Il ne s'avait pas comment l'apaiser. C'est vrai que cette femme sans noblesse et sans apparence était une chanceuse: meilleure amie de l'amante du Roi, amie du frère du roi et plus encore avec d'autre memebres de la famille royale. PHilippe voulait être aimer pour ce qu'il était et non pour sontitre ou haï pour ses vices.

"J'ai été blessé à la soirée pour avoir aimé une femme que tout m'opposait. Je vous apprécie, vous êtes mon amie, et je vous implore de le rester sans changer d'attitude."

Ne pas le regarder autrement ? Ne PAS le regarder autrement ? Et comment faire, s'il vous plaît, lorsqu'on découvre que son ami est un personnage si important qu'on ne mériterait même pas de cirer ses bottes ? Ce n'était pas exactement comme cela qu'Isabelle se voyait, mais techniquement, hiérarchiquement, c'était à peu près ça.

Et puis, eh oh ! Elle n'aurait jamais pu prétendre une seconde que le frère du Roi, et ce n'est pas n'importe qui tout de même, pourrait seulement s'intéresser un peu à la petite domestique qu'elle était il n'y a pas si longtemps. Dans sa tête, jamais Monsieur, duc d'Orléans, qui avait tout ce qu'il voulait en un temps record, ne lui ferait faire une superbe robe, ni ne l'inviterait à un bal, et encore moins s'occuperait d'une affaire aussi ridicule que de transformer une sotte petite servante en femme de chambre. Dans sa tête, Philippe d'Orléans serait occupé par autres choses, par la cour, par les fêtes, par le monde... limite capricieux. Non, dans sa tête, jamais il ne se serait intéressé à elle.

Et puis d'abord, pourquoi les Grands de la cour avaient pris la manie de s'intéresser à elle ? Hein ? C'était pas un peu fini ce cirque ?

Ou alors... L'explication, ce serait qu'il s'était tout simplement intéressé à elle parce que cela l'amusait de transformer une pauvrette en Cendrillon, et aussi pour plaire à l'amante de son frère.

Ouais. Qui sait.

Lorsqu'il expliqua pourquoi il s'était fait passer pour Philippe, simplement Philippe, la brunette se sentit un peu honteuse d'avoir pensé cela. Il était vrai qu'il pouvait sans doute compter sur peu de gens. Je veux dire, ceux qui cherchaient son amitié sans intérêt secondaire devaient être extrêmement rare. Il était frère du Roi, tout de même, il était prince, il était fils de France, il était Monsieur. Il n'était pas Philippe, simplement Philippe.
Et il ne le serait probablement jamais, ou que très peu.

Isabelle baissa le regard, ne sachant que dire. En fait, cette découverte lui était choquante, parce que... eh bien, pour commencer, ce n'était pas elle qui avait tout simplement déduit d'après ses paroles qu'il était cousin éloigné du Roi. Non. C'était lui qui l'avait dit.

"Vous m'avez menti," marmonna-t-elle pour se donner contenance. "Vous m'aviez dit que vous n'étiez qu'un cousin éloigné du Roi. Et moi je vous ai cru."

Elle n'avait jamais apprécié qu'on lui mente. Généralement, le mensonge était rapidement décelé, parce que son intuition et sa méfiance ne la laissaient jamais tomber. Mais elle avait accordé sa confiance. Pourquoi est-ce que quand elle le faisait elle se voyait souvent trompée ?

Du moins, c'est ce dont elle avait impression.

Blessé par une femme qu'il avait aimé, disait-il... Isabelle n'était pas si dupe que ça, tout de même, et Carmen lui vint tout de suite en tête. Mais elle n'arrivait pas à croire que cette jeune fille, qui avait été si sympathique avec elle, aurait poignardé Monsieur. Mais pourtant, elle avait bien compris que Monsieur appréciait beaucoup la jeune femme. Étrange. Devait-elle se risquer à le questionner ? Bien. Puisqu'il lui disait d'agir comme d'habitude, c'est ce qu'elle ferait. Elle agirait comme d'habitude.

Et d'habitude, cela consistait à ne pas avoir de scrupules à poser une simple question.

"Sans vouloir être indiscrète, Monseigneur, Carmen aurait-elle à voir avec cette affaire ?"

Ses yeux étaient toujours baissés. Le "Monseigneur" était sorti tout seul, et elle ne s'en aperçut que trop tard ; elle ne savait pas s'il le prendrait mal ou pas.

Ne pas changer d'attitude n'était pas si facile. Lorsqu'on a une position si inférieure, comment faire pour s'assurer que se comporter "comme d'habitude" ne va pas vous mener à votre perte ?

Philippe la regarda n instant avant de lui dire.

Je ne vous ai jamais dis que j'étais un cousin éloigné. C'est vous qui l'avait déduit. Vous ne me l'avez jamais demander.

Philippe écouta la jeune femme avec attention et i lla regardait avec une demande de clémence dans ses yeux. Lorsqu'il entendit le Monseigneur, il ne put l'ignorer.Elle allait le traiter comme tous ces noblions de la Cour tous ses fanfarons, ces paons qui ne pensent qu'à faire la roue devant lui pour avoir les faveurs du roi. Non, il n'avait pas avaler le monseigneur.

Voyez vous changez déjà à mon égard. Il n'y a personne à impressionner nous sommes deux êtres humains. Essayez d'oublier les titres qui ne sont que des mot.

Philippe se dit qu'il avait perdu peut-être la seule personne qui l'apprécier pour ce qu'il était. Après tout selon les rumeurs Carmen ne l'aimait pas elle lui tournait autour pour son rang.

Carmen était avec moi avant que je me fasse poignardé. Elle est le seul témoin. Peu importe, maintenant!

Philippe se releva et tourna le dos à Isabelle pour ne pas qu'elle oit à quel point i létait blessé.

Si mon titre de monsieur n'attire pas les honnêtes gens vers moi. Je l'abandonnerais. J'en ai assez de cette vie où l'on ne me voit pas comme Philippe. Le second homme de frère. Le dauphin, le frère du roi!

Techniquement, au fait, il ne l'avait jamais vraiment affirmé, c'était vrai. Isabelle revoyait la scène passer dans sa tête, comme si elle s'était déroulée la veille... la première fois qu'elle avait rencontré Monsieur, c'était dans un passage secret. Il l'avait bousculée, et par sa faute, le plat qu'elle apportait à une comtesse dodue s'était renversée par terre. Il s'était grassement excusé, et à ce moment-là, elle avait remarqué qu'il ressemblait au Roi...

Citation :: "Seriez-vous... apparenté au Roi, Monseigneur ? Un de ses cousins, peut-être ?" avait-elle questionné.

"Eh bien, Mademoiselle, je suis effectivement apparenté au Roi." avait-il répondu.

Il ne l'avait pas dit, mais il n'avait pas vraiment cherché à lui faire comprendre la vérité non plus. N'importe qui aurait pu s'y prendre.

"Mais vous ne l'avez point démenti ! Vous disiez être apparenté au Roi. Jamais je n'aurais eu la prétention de croire que le frère du Roi m'adresserait la parole !" répliqua-t-elle avec amertume, têtue.

Ce n'était peut-être pas la meilleure des choses à dire, parce qu'encore une fois elle jugeait par le titre. Il est vrai qu'il est difficile de croire que Monsieur, cet être d'ordinaire si inaccessible, serait humain comme les autres. C'est vrai. Alors, elle excluait cet étranger lointain de son monde.

C'est pour ça qu'elle ne s'était pas doutée une seule seconde qu'il était qui il était ! Monsieur n'était pas de son monde !

Mais, à réflexion faite, le Roi et un prince du sang ne l'étaient pas non plus.

Mais ce n'était pas une raison pour que Monsieur le soit tout d'un coup !

Stupéfaite, elle observa Philippe la tancer, presque se mettre en colère. Étrangement, cela lui fit penser à François qui lui demandait de ne plus l'appeler "Monseigneur". Il ne l'avait pas fait pareillement, certes ; il avait été plus doux. Mais cela revenait au même, et avec un pincement de coeur, elle se demanda que lui valait le privilège d'appeler les Grands par leurs prénoms.

Peut-être que des gens tueraient pour en être aussi proches qu'elle. Alors si Dieu voulait la récompenser de quelque chose, elle se demandait bien de quoi.

De toute façon, elle n'avait jamais rien demandé de la sorte. Elle n'avait jamais demandé à posséder le coeur du duc de Beaufort, ni à avoir l'amitié et la confiance de l'amante du Roi, ni celles de Monsieur, encore moins la complicité du Roi. Elle voulait juste François, Marie, Philippe et Louis. Elle n'avait jamais voulu rien de plus.

Peut-être était-ce pour cela que Dieu lui en donnait le droit. Parce qu'elle ne l'avait jamais vraiment cherché.

La brunette sentit ses joues s'échauffer, confuse. Elle avait gaffé. Mais on ne pouvait pas le lui reprocher.

"Si les titres n'étaient que des mots, personne ne vous accorderait tant d'attention, vous n'auriez pas de si beaux appartements, vous ne seriez pas si riche. Je le sais bien. Moi, je n'ai pas de titre et on ne me respecte pas comme on vous respecte. Cela signifie tout de même quelque chose. C'est vrai, cela ne change rien à qui vous êtes ; mais cela fait de la différence sur la manière dont vous vivez."

Elle ne le savait que trop.

"Alors je ne sais pas comment je dois me comporter avec un si haut personnage. Je ne sais plus. Si on me voyait vous appeler par votre prénom, comme je l'ai fait tantôt, vous savez bien qu'on me rosserait. Je vous considère toujours comme un ami, mais selon les règles, je n'en ai pas le droit, n'est-ce pas ? Alors que dois-je penser en fin de compte ?"

À vrai dire, ce genre de règle, elle s'en fichait pas mal. C'était pour le principe. En général, un gentilhomme bien né, TRÈS bien né à l'occurence, ne lui pardonnerait pas de le traiter comme un égal.

Oh non. Il ne lui pardonnerait pas. Il la punirait, même.

Très bien, puisqu'il ne semblait pas vouloir parler plus de son incident, Isabelle décida de n'en plus toucher mot, non cependant sans froncer les sourcils. Il y avait anguille sous roche.

Enfin, elle se sentit rougir encore de culpabilité en le voyant lui tourner le dos. Sans doute lui avait-elle déplû... ce n'était pas une bonne chose, et pas seulement parce qu'il était Monsieur.

D'ailleurs, elle s'étonna fort de ses paroles. La jeune servante pensait qu'il serait plutôt fier de ce titre, et non pas qu'il songerait à le renier pour quoi que ce soit. Après tout, il était frère du Roi de France... fils de la royauté. C’était censé être un don de Dieu. De plus, comment pouvait-il renoncer à une place tant convoitée, aisée à souhait, lorsque beaucoup n'avaient pas eu autant de chance ? Elle pensait évidemment à la condition de certains de ses amis du peuple. Quant à elle, elle ne la convoitait pas ; cela ne l'avait jamais intéressée.

Pour autant, elle pouvait comprendre. Elle était assez entourée de personnages importants pour comprendre que la superficialité de la Cour était un fardeau.

"Mais voyons, c'est impossible ! Vous ne pouvez pas quitter ce titre. Ce serait inutile. On ne lutte pas contre sa naissance..." Mensonge ! Elle n'avait jamais cru en cette phrase. "Je sais que votre vie n'est certainement pas une réalité facile pour tous les jours ; mais je peux vous garantir votre chance. Et ne vous imposez pas une si dure fatalité ; voyez Sa Majesté votre frère, il a bien fini par trouver une personne qui l'aime pour lui, et non pour ses faveurs."

Ce seul argument lui semblait bien fort. Convaincue de ce qu'elle disait, elle ne put que sourire à Philippe pour l'assurer de son amitié. Puisqu'il voulait une amie, une véritable amie, elle voulait bien prendre cette charge ; mais nous ne cacherons pas que la révélation de tantôt l'intriguait toujours autant.

Philippe regarda Isabelle et lui sourit. Certes il ne l'avait pas démenti mais poruquoi aurait-il démenti être apparenté au roi alors qu'effectivement il était apparenté au roi
Pourquoi aurais-je démenti? Je suis apparenté au Roi puisque je suis son frère! Est-ce que cela change quelque chose que se soit le frère du roi ou son cousin qui vous parle?
Philippe avait la sensation qu'elle mettait de la distance entre eux deux. Le titre avait donc autant de valeur que ça. Son titre il s'en moquait éperduement.

Certes je suis un grand mais entre nous vous m'appelez Philippe parce que vous aviez mis de l'amitié entre nous. Mon titre n'a pas à changer cela. Suis-je aussi identique que tous ces nobles froid? Je suis toujours Philippe même si mon nom complet est philippe de Bourbon duc d'Orléans. Je suis toujours Philippe.

Philippe vit qu'elle semblait être totalement perdu et angoissé. Il tenait tant à son amitié qu'i laurait prêt à n'importe quoi pour ne pas la perdre.

Vous me voyez différemment. Je vis de façon plus riche certes mais ne voyez vous pas que je suis plus prisonnier que vous. Je n'ai pas le droit de sortir de cette cage dorée sans autorisation et sans gardes. Je suis victime de rumeurs plus que blessante. Ma vie n'est pas à enviée. Je suis le second de France et rien d'autre.

Philippe sentit la colère monter. Il avait peur de n'être plus rien d'autre qu'un prince aux yeux de son amie.

Vous êtes mon amie et si je vous autorise à me nommer par mon prénom nul ne doit s'y opposer. Vous devez vous comportez avec moi comme avec un ami. Mon frère a trouver l'amour mais la Cour va s'amuser à les séparer comme mon titre vous sépare de moi. Ma vie n'est point enviable. Sachez cela Mademoiselle.

Puisqu'elle voulait reprendre les titre, il les reprit. Il était en colère que sa naissance si mauvaise puisse le blesser autant que blesser les autre. Sa vie n'était pas rose comme les apparats le faisait paraitre. Les rumeurs, les manipulateurs et autre...

Quelque part, il avait bien raison. On ne dément pas si c'est vrai. Et il était vrai, même totalement vrai qu'il était apparenté au Roi. Oui, mais... lorsqu'on est carrément Monsieur son frère, on est censé se dénoncer !

Comme cela, on évite les surprises.

Surtout que... surtout que le jour où elle l'avait rencontré, il n'était pas habillé comme un noble, pour commencer. Il avait une cape à capuche. En gros, rien de propice à le reconnaître.

Mais bon. Soupir. Ce qui était fait était fait. Maintenant, elle savait. C'était mieux, sans doute ; au moins, cela lui éviterait de faire des gaffes à l'avenir.

Quant au fait que ce soit le frère, et non le cousin qui parle...

Malgré le choc qu'elle avait eu, la belle eut un sourire taquin.

- Si cela changerait quelque chose ? Je crois bien que je ne réagirais pas du tout de la même façon, à vrai dire, si j'avais l'un de vos cousins devant moi... Oh, non. Je réagirais très différemment, si vous étiez un certain François de Vendôme ! -

Elle fit tout exprès de laisser un certain mystère dans cette fin de phrase.

Après tout, se disait-elle, le Roi n'ignorait pas sa liaison avec le prince du sang. Pourquoi Monsieur, ou plutôt Philippe, cet ami si aimable, ne pourrait-il point le savoir ? En plus, c'était grâce à lui qu'elle avait pu passer quelques moments en compagnie de son amant lors du bal. Il fallait bien lui conter l'histoire, et...

Le remercier. Rien de plus normal.

Le choc passé, c'était bien plus facile de retrouver la sympathie naturelle qu'elle avait depuis toujours envers son ami.

C'est vrai. Après tout, il était toujours Philippe.

Doucement, un sourire apaisant affiché sur le visage, Isabelle entreprit de le rassurer :

- Non... Philippe. Vous n'êtes pas comme ces nobles jasants de la Cour. En m'acceptant comme amie, vous m'avez fait voir que vous êtes bien plus estimable que n'importe lequel d'entre eux. Et pourtant, c'est vrai, vous êtes un Grand. Mais... je vais vous confier une chose. Ces derniers temps, j'apprends que les Grands peuvent être des gens pour le moins admirables. Et vous n'échappez pas à cette option. Vous avez tant fait pour moi... -

Un petit compliment ajouté par-ci-là. Elle aimait bien faire cela.

Appuyée sur ses deux mains posées sur le banc, position assise vers l'arrière, la jeune femme était réellement plus détendue que tantôt.

Elle se disait juste qu'elle aurait peut-être dû s'y attendre. Elle ne croyait plus à des coïncidences. Tout simplement, elle avait un talent inné pour attirer les gens très importants de la Cour vers elle.

Oh, Seigneur... faites tout de même qu'elle ne rencontre pas Mazarin au prochain coin de rue. Ce serait très malsain, et elle ne savait pas comment si prendre pour égorger un cardinal devant tout le monde.

Bref.

Elle écouta, donc, avec attention, le prince Philippe lui conter sa vision de sa vie. La pauvrette, identifiant bien ce qu'il racontait à ce qu'elle avait vécu, eut un triste sourire.

- Oh, je comprends, tout de bon. Je dois dire qu'être domestique n'est pas très différent, en fin de compte. Sauf que dans ce cas, on se trouve au milieu de jolies choses et d'un luxe qu'on ne possède pas, on peut toujours se faire rosser ou hurler dessus, et il ne faut pas faire d'erreurs. Néanmoins, les amis ne manquent pas... Et c'est ce qui aide à supporter. Alors, oui, je crois bien vous comprendre, si vous vous sentez seul. Mais vous pouvez compter sur moi, parole. -

La demoiselle s'en voulut quelque peu, il est vrai, d'avoir blessé son cher ami. Disons qu'elle l'avait fait sans le propos de le faire.

Et puis, que Marie et le Roi couraient à chaque instant des graves dangers de séparation éternelle, cela, elle le savait. Elle craignait, même. Que ferait-elle sans Marie ?

- Je sais... je le sais bien. Mais j'ose espérer que Sa Majesté votre frère ne laissera personne le séparer de mon amie... je sais qu'elle en mourrait de chagrin. Et vous aussi, Philippe, je crois... je crois sincèrement que vous n'êtes pas condamné. Votre position n'est pas si enviable, c'est vrai ; mais c'est tout de même un privilège, don de Dieu, et je ne crois pas que vous ne puissiez être heureux étant qui vous êtes. Il suffit simplement de trouver comment. -

En guise de soutien, Isabelle adressa un regard chaleureux à son ami. Il n'était pas seul, non, et il fallait qu'il le sache à tout prix.

Philippe écouta attentivement Isabelle. Lorsqu'elle entâma le sujet de François, il releva la tête et fit un sourire. Son coeur était donc pris par son indomptable cousin. Cela n'était en rien surprenant vu que son cousin était bel homme mais que ce soit réciproque: voilà qui était aussi habituel que les cochons volants.

"Mon cousin? J'en suis ... surpris!"

Elle avait dompter le coeur sauvage de François grand bien leur fasse. C'était amusant. Philippe était heureux pour eux.

Lorsqu'elle lu idit qu'il n'était pas comme les autres nobles, c'était peu mais c'était suffisant pour lui réchauffer le coeur. Elle le comprenait et c'était ce qui comptait le lus aux yeux non pas du frère du roi mais de l'ami.

Vous avez tant fait pour moi... -

Philippe trouvait que c'était peu. Elle méritais plus. Il voulait qu'elle connaisse le bonheur qu'il ne connaissait pas. Elle voulait l'amour. Philippe trouverait un moyen de rapprocher encore plus les amants sans éveiller les soupçons de le Cour. Il se le promettait.

"Je ferais plus encore pour toi. Je ne fais pas ça par amour mais par amitié sincère et forte!"

Philippe sourit.

- Je sais... je le sais bien. Mais j'ose espérer que Sa Majesté votre frère ne laissera personne le séparer de mon amie... je sais qu'elle en mourrait de chagrin. Et vous aussi, Philippe, je crois... je crois sincèrement que vous n'êtes pas condamné. Votre position n'est pas si enviable, c'est vrai ; mais c'est tout de même un privilège, don de Dieu, et je ne crois pas que vous ne puissiez être heureux étant qui vous êtes. Il suffit simplement de trouver comment. -

Philippe savait à quel point son frère et Marie s'aimait et même s'il ne pouvait pas empecher son frère de partir, il veillerait à ce que leur amour ne soit pas une nouvelle victime de al Cour durant l'absence de Louis.

"Je vous promet que je veillerais sur Marie durant l'absence de mon frère et je veillerais à ce qu'elle ne soit pas évincer de la Cour. Leur amour restera pur comme le votre pour François. s ije peux toujours me confier à vous... à toi... Je te dirais simplement que je crois avoir trouver l'amour. J'espère qu'il sera aussi fort que celui de Marie et Louis."

Il porta la main sur son coeur et il donna la sensation de le serrer fort. Il espérait qu'avec Cyrielle ça dure indéfiniement. Il y croyait plus que tout. Il sourit alors à Isabelle.

"Allons même en ces temps difficiles, nous pourrons restés unis devant la difficulté! Je veillerais sur vous toutes !!"

Coquette, Isabelle se trouva fort bien aise de pouvoir informer Monsieur de la conquête de son cousin. Il lui sembla qu’il l’admirait même pour une telle prouesse ; elle s’en réjouissait tout autant et même plus, mais comme on peut l’imaginer, pour d’autres raisons… un vent de nostalgie s’empara de la belle. C’est qu’elle repensait à son amant, et la soirée du bal qui avait été grandiose à son vu. Ce qui pouvait être, tout compte fait, un peu insensible face à Philippe qui lui avait souffert ce soir-là. Mais…

Mais… c’est qu’elle voyait si rarement François… que ces moments passés en sa compagnie, bien que semblant lointains, lui revenaient comme une source de réconfort, et lui manquaient horriblement.

C’est aussi pourquoi Isabelle eut un sourire plein de gratitude devant son ami. Elle le voyait bien, elle, qu’il ne comprenait pas qu’il en avait déjà beaucoup fait… Peut-être, s’il avait connu l’histoire…

« Mais mon ami, je tiens au moins à vous remercier. Savez-vous que j’ai pu retrouver François quelques instants lors du bal, grâce à vous ? Vous l’ignoriez, mais, croyant me présenter votre cousin, vous m’avez tout simplement permis de ne pas regretter cette soirée. Depuis, je la considère comme un cadeau que j’ai reçu de vous… Seulement… » Elle ajouta, plus doucement : « Je regrette que son issue vous ait été si funeste… »

Et puis, Monsieur promit de veiller sur Marie. En quelque sorte, Isabelle lui fut reconnaissante pour cela aussi ; la situation de son amie l’inquiétait beaucoup trop.

Et puis, il avoua être amoureux. Amoureux… de qui ? De Carmen ? Il n’en voulait pas parler, certes. Mais elle ne pouvait rien deviner. Jugeant que l’affaire n’était pas de son ressort, la brunette soupira, un sourire un peu béat attaché aux lèvres.

« Eh bien, cher ami, j’espère que vous pourrez donc goûter aux bienfaits de l’amour le plus longtemps possible… »

C’est qu’il recommençait à lui manquer, ce bougre de François.

Et en plus…

Et puis…

Sauf que…

Tilt.

Hey.

Hey, hey.

C’était quoi cette histoire de « l’absence de mon frère » ?

En vérité, la brunette n’avait pas encore eu le temps d’ouïr ces rumeurs. Elle avait dû, peut-être, les entendre par-ci par-là, mais elle n’y faisait pas vraiment attention. Ou alors, elle n’avait pas cru.

Il faut dire qu’on n’était pas si loin de la soirée du bal, et que les rumeurs s’amplifiaient encore sur le sort de Monsieur, le frère du Roi.

Alors, des rumeurs comme le siège de Dunkerque… ça lui passait tout simplement par-dessus la tête.

« Je… comment ? Absence ? Quelle absence ? » paniqua-t-elle.

Seeeeeigneur.

Philippe d’Orléans est prié de ne pas causer d’attaques cardiaques illicites en la personne de sa domestique brune d’amie.

Ou alors ça ira très, très mal.

Mon Dieuh mon Dieuh. Est-ce que Marie savait ? Est-ce que Marie était au courant ?

De quoi ? MAIS QUE SON AMANT ALLAIT S’ABSENTER !

Et puis s’absenter pour quoi, d’ailleurs ?

« Ph-Philippe… Je… Il n’y a rien de grave, n’est-ce pas ? Pourquoi Sa Majesté va-t-elle s’absenter ? »

Elle avait pâli à vue d’œil. Pâli, pâli et repâli.

Mon Dieuh.

Elle s’inquiétait des suites de cette histoire, peut-être un peu de trop.

Mais Louis le Grand n’avait-il pas seulement envisagé les dommages qu’il causerait dans le cœur de sa copine s’il partait ?

Enfin, si c’était juste pour quelques jours, ça irait. Mais quelque chose disait à Isabelle que ce ne serait pas le cas, et que la raison serait assez difficile à engloutir.

En gros, Marie allait souffrir.

Ce qu’Isabelle ne supporterait pas.

Et manquait plus que Philippe emploie les mots « temps difficiles ».

« Oh, que se passe-t-il ? Qu’y a-t-il ? Racontez-moi, Philippe… J’aurais peut-être dû faire plus attention aux rumeurs… »

Elle craignait le pire.

Elle craignait vraiment le pire.

Et au fond, elle n’avait pas tort.

Philippe pensait en avoir trop dit. Il le regrettait déjà et se mordit la lèvre inférieure. Il avait paniquée la belle au lieu de l'apaiser comme il le voulait. Il se sentait coupable et déçu de lui même. Il plongea son regard dans celu id'Isabelle et prit ses bras dans ses mains. Il était si proche l'un de l'autre que tout inconnu passant ici penserait voir deux amants.

"N'ayez crainte, ma chère! François est un grand militaire. Il ne lui arrivera rien. Les espagnols nous cherchent querelle."

Voyant la peur dans le regard de la belle, il tenta de l'apaiser. Il lui sourit se voulant confiant.

Il restait en arrière pour deux raisons: il était boiteux et, en plus, on lui avait prit toute chance d'être un grand chef militaire pour éviter qu'il ne fasse de l'ombre à son frère.

Il regarda Isabelle et l'invita a s'asseoir proche de lui. Il posa sa main sur son épaule. Loin de lui toute idée de couple. Il ne profiterait pas la situation et Isabelle n'était à ses yeux qu'une excellente amie.

Il cherchait le moyen de l'apaiser par les mots et les gestes.

"J'ai promis de veiller sur Marie à mon frère comme je le prometterais à François de veiller sur vous. Je suis trop... enfin je ne suis qu'un poid. Je ne peux me battre."

Il baissa les yeux et réunit ses mains devant lui. Après un moment de silence, il massa sa hanche blessée. Elle était de nouveau douloureuse puis reprit:

"Je n'aurais pas du vous dire cela. Je vous inquiète plus qu'autre chose!"

Hein ?

Hein ?

HEIN ?

Qui parlait de François, d'abord, hein ? Qu'est-ce qu'il avait à faire là-dedans ? Qu'est-ce qu'on en avait à faire que c'était un grand milit... ?

Oh mon Dieu.

Les yeux de la jeune femme devinrent aussi ronds que des soucoupes. En toute évidence, elle venait de comprendre.

Ainsi donc... les espagnols cherchaient querelle à la France. Cela, elle le savait. Tout le monde le savait depuis belle lurette. Mais en plus, d'après ce qu'elle avait compris, la guerre prenait une tournure différente.

En gros, ils allaient tous se faire massacrer au front. Voilà ce que comprenait Isabelle.

Mais...

Mais ils ne pouvaient pas ! C'était quoi, cette histoire de décider, soudainement, de s'en aller à la boucherie, mourir tout simplement comme était mort son père, sur le front ? La laisser toute seule, ainsi que son père avait abandonné sa mère ?

Mais les hommes avaient subi une cure de bornage intensif ou quoi ?!

Voilà à peu près comment la chose se déroulait dans sa petite tête brune.

C'était à peine si elle écoutait Philippe. Ses mains se mirent à trembler ; ses yeux, bien que fixés sur son ami, étaient absents. Elle réfléchissait à toute allure.

Elle ne pouvait pas laisser cela arriver. Elle ne pouvait pas le laisser partir.

Et le Roi ! L'idée était saugrenue. Pourquoi partait-il ? Il avait le choix, non ? Et Marie ? Il y pensait ? Est-ce qu'il avait pensé un seul instant à Marie ?

Est-ce que les hommes pensaient aux sentiments des femmes, de temps en temps ?

Elle se leva très, très soudainement du banc. En fait, tout était confus en ce moment-là. Elle était perdue. Sa tête allait exploser...

Il fallait qu'elle en parle à Marie, de toute urgence.

Brusquement, elle se retourna vers Monsieur, le regard suppliant.

"Mais vous, au moins, je pourrai compter sur vous. Je pense... il est bien plus sage de rester ici, et je... Oh, Philippe, n'y a-t-il pas un moyen de l'en empêcher ? De les empêcher, tous deux, de partir ?"

La panique s'emparait d'elle ; tout d'un coup, alors que tout avait commencé si doucement, si calmement, le coucher de soleil en spectateur, elle se sentit une difficulté à respirer. C'était l'effet de cette nouvelle qui la prenait au dépourvu. Craignant que cet étourdissement la mène à la perte de conscience, il lui sembla plus sage de se rasseoir.

Et, dans l'obscure clarté du soleil déjà couché, on pouvait voir deux yeux briller de larmes qui refusaient de couler.

Philippe était malheureux de ne pas pouvoir apaiser Isabelle. Son regard triste et implorant lui déchirait le coeur. Il ne pouvait lui dire ce qu'elle voulait entendre.

"Je suis désolé. J'ai déjà essayer de retenir mon frère et mon cousin. Personne ne peut les retenir. Nos prières les accompagnent. Ce sont de valeurs combattants. Depuis que nous sommes enfants, mon frère s'entraine à conquérir dans son petit fort du jardin de Saint-Germain. Il est courageux!"

Philippe s'avança. Hésitant, tendant les bras à moitié puis les remettant en place et à nouveau les tendant, il finit par prendre Isabelle dans ses bras pour la consoler.

Les voyant ainsi triste sans secours, il eut une idée. Elle pourrait quoiqu'il arrive garder une partie de FRançois prêt d'elle d'une certaine manière. Il posa ses mains sur les épaules dénudées d'Isabelle et la repoussa doucement de lui. Il chercha son regard et plongea le sien en elle.

"Isabelle, je ne peux faire rester mon cousin. Je vous promets mon aide, mais si cela ne vous suffit pas, demandez à François de vous présenter la Duchesse de Nemours. Vous comprendrez après!"

Il sourit. Cela concrétiserait d'une certaine manière son amour pour François. Il savait que la duchesse n'était pas méchante et qu'elle comprendrait la situation, elle qui rêvait d'amour. Le voir dans le coeur de son frère lui suffirait amplement.

"J'ai le regret de ne pouvoir vous offrir plus. Je sais qu'ils reviendront sains et saufs. Laissez-moi veiller sur vous et Marie. Sachez que la place de Marie sera, après le départ de mon frère, fragile. Il faudra l'empêcher d'être au centre des regards. On risquerait de s'en servir contre elle et de la faire partir de Versailles. Il ne faut pas la laisser seule, après le départ de Louis, on l'enlèvera."

Philippe était intéressé par le malheur d'Isabelle. Il fera la même promesse à son cousin qu'il a fait à son frère s'il le voit avant le grand départ mais les malheurs qui vont tourner autour de Marie après ce départ funeste risquait de la mener à l'exil. Philippe avait promis à Louis d'empêcher cela par tous les moyens. Quitte à lui filer le train!

Sans bouger, presque passive, la Brunette écouta un moment le discours de Monsieur sur les faits de guerre juvénils du Roi, et sur ô combien les deux jeunes militaires dont il était question étaient courageux et valeureux et bla bla bla.

Ouais, c'est ça.

Eh. Courageux, peut-être, mais complètement insensé, oui !

Déjà, un sentiment d'injustice évidente commençait à surgir dans le coeur d'Isabelle. Injustice... pourquoi, de l'injustice ? Parce que c'était tout simplement injuste de devoir regarder partir la personne qu'on aime en se sentant tout à fait impuissante.

Foi d'Isabelle, ça ne se passerait pas comme ça. Elle allait tout faire pour le retenir, et elle serait prête à gager que Marie ferait de même pour Louis.

Tandis que Philippe la prenait un peu dans ses bras, comme un bon ami fait d'habitude pour réconforter lorsque ça ne va pas, Isabelle dût abandonner définitivement tout espoir d'aide de la part du prince de France. Il dénia pouvoir l'aider, et, vrai, Isabelle lui en voulut un peu.

Lui qui était si influent, pourquoi est-ce qu'il ne pourrait pas lui donner un coup de main ? Surtout lorsque l'enjeu était si grave ?

Il proposa, vraisemblablement, l'aide d'une duchesse. De Nemours, c'est bien cela ? Mais Isabelle écarta tout de suite cette aide. Elle ignorait qui elle était, et la pauvrette n'avait pas envie de compter sur une tierce personne, encore une duchesse en plus, donc assez importante, et totalement inconnue, pour une affaire de pareille gravité. Et puis, si Isabelle elle-même ne pouvait convaincre François, pourquoi est-ce que cette femme le pourrait ? Hein ? Qu'était-elle pour le duc, d'abord, pour oser prétendre avoir plus d'influence sur lui que la fille qui avait volé son cœur ? Isabelle, une vague de jalousie envahissant ses sentiments, refusa par orgueil de demander seulement en quoi cette femme pourrait l'aider. De toute manière, pensait-elle, elle aurait très vite fait d'oublier ce nom de duchesse de... de quoi, déjà ?

Monsieur tentait de rassurer la jeune femme, mais ses arguments furent bien faibles. Il ne pouvait, songea-t-elle, lui assurer que François n'aurait pas des prob...

Ne pas y penser. Surtout ne pas y penser.

Par contre, s'il avait bien raison sur une chose, c'est que Marie aurait des soucis après que le Roi soit parti. Is se mordit la lèvre inférieure, inquiète. Marie, exilée ? De un, ce serait très, très, très pas cool. Non, pire. Ce serait l'enfer. Marie, éloignée de la cour de France équivaut à Marie éloignée de Louis, et aussi d'Isabelle, d'ailleurs. Marie toute seule, sans Louis et sans Isabelle... ça, ça équivaut à beaucoup de tristesse. Et ça ne plaisait pas du tout à la femme de chambre dévouée de la Blondinette.

Sans compter le fait, évidemment, que si Marie partait... que devenait sa femme de chambre, alors, hein ? Elle était jetée à la rue. Ce n'est pas très fun non plus.

Mais pour Isabelle, la solution à tout cela n'était pas de simplement veiller sur Marie et attendre que ça se passe. Non. Pour elle, il serait mille fois plus sensé de tout simplement convaincre Louis de ne pas partir.

Et là, pas d'exil pour Marie, puisque le Roi n'est pas parti.

Isabelle, tu es un génie.

Têtue, elle exposa à nouveau à son ami :

"Voilà pourquoi il ne faut pas que le Roi parte. Sans le Roi, ce sera bien plus difficile. Il vaudrait mieux qu'il ne risque pas sa vie, la France et Marie ne s'en porteront que mieux. Vous allez voir, Philippe. Puisque vous ne pouvez rien faire, Marie et moi, nous allons tenter de les persuader."

Parce que c'était ainsi, point final. Ce serait dur, évidemment. Isabelle n'avait encore aucune idée de comment procéder. Mais elle en parlerait à Marie. Ah ça ! Et les deux jeunes femmes trouveraient, elles trouveraient comment faire, ou elle ne s'appelait pas Isabelle.

» Seule [Philippe]